LE CRIDEV EN GRÉVE ET CONTRE TOUT !?
Oui en partie…
« Et la rue elle est à qui ? Elle est à nous ! À qui ? À nous ! »
« La retraite / À 60 ans / on s’est battu pour la gagner on se battra pour la retrouver / la retraite… »
« Nous sommes fortes nous sommes fières et féministes et radicales et en colère ! »
« So-So-So solidarité pour tous les sans-papiers ! »
En réponse à la politique de Macron depuis 6 ans, les résistances s’amplifient, se durcissent, se massifient…
Octobre 2017 : baisse des APL (aide au logement) de 5 euros #paupérisation des plus pauvres
Août 2018 : première Loi Asile et Immigration #système oppressif en +++ pour les exilé·e·s
Septembre 2019 : Lancement du « Grenelle contre les violences conjugales » #plus de blabla que de moyens déployés
Février 2023 : application de la 2ᵉ réforme chômage #moins de chômages moins longtemps
Mars 2023 : Loi sur les retraites #plus de temps de travail moins de retraite
À venir la Loi Darmanin, nouvelle loi contre les exilé·e·s
Et j’en passe sur les soignant·e·s, les précaires, sur les dégâts écologiques… de la politique de Macron.
Mais en vis-à vis les résistances persistent, continuent et s’intensifient :
#metoo ( et tous les autres hashtags qui ont suivi)
les gilets jaunes
black live matter (contre les violences policières racistes / classistes…)
la ZAD Notre-Dame-des-Landes
Les mégabassines de Sainte-Soline

…pour ne citer que les plus massives (mais de multiples luttes locales / plus petites, de multiples actions d’éducation populaire politique / de syndicats, de collectifs et autre, de multiples alternatives de vies participent aussi des résistances de la période.)
Aujourd’hui un mouvement social d’ampleur contre la loi retraite avec une multiplicité de modes d’actions complémentaires… https://expansive.info/
Ces contestations touchant autant de monde concernant les retraites, nous parlent aussi et surtout de nos mal-êtres au travail #le livre Le capitalisme paradoxant, un système qui rend fou
C’est pour cela qu’au CRIDEV nous ne sommes pas tout le temps en grève car comme beaucoup d’entre vous, nous sommes aussi contraint·e·s par le contexte actuel, et nous devons aussi travailler pour que l’association continue de survivre.
Comme en 2019, nous revivons une situation politico-économique qui pèse et que nous avions dénoncé : http://blog.cridev.org/editos/le-cridev-en-greve-dedito/
Aujourd’hui nous nous retrouvons avec toujours plus d’activités, plus de personnes qui vivent des mobilités internationales, des personnes qui viennent nous voir pour être accompagnées sur des discriminations, et toutes nos dépenses courantes ont augmenté (hormis nos salaires) mais les recettes en face non seulement n’augmentent pas (pas d’augmentation proportionnelle des conventions) mais en plus elles se disloquent, s’émiettent.
En parallèle, on observe une hausse des appels à projets, offres qui consistent à financer des projets avec une exigence de thématique, de productivité et de résultat. Symboliquement, cela signifie que l’État ne soutient plus les associations pour ce qu’elles sont, ni même pour ce qu’elles font, mais pour ce qu’il leur fait faire (#NewManagementPublic). Cela pose question quant à la place laissée aux associations comme contre-pouvoir démocratique. Ainsi, des directives de plus en plus importantes de la part des politiques publiques conditionnent l’offre et limitent l’autonomie des professionnel·les dans leurs pratiques.
Comment redonner une place centrale à l’accompagnement qualitatif dans un système empreint par des missions gestionnaires et managériales de plus en plus importantes ?
Concrètement en mars nous avons dû faire : 10 demandes de subventions sur des toutes petites sommes (1 500 euros par ci, 5 000 euros par là). Chaque service auprès de qui est fait la demande nous oblige à contorsionner nos actions pour rentrer dans LEURS cases.
Chaque service propose des CASES différentes, avec des subventions à déposer sur des PLATEFORMES NUMÉRIQUES, toutes différentes.
« En fait ces outils sont loin d’être neutres »p83
« Il n’y a pas de servitude volontaire mais plutôt une liberté sous contrainte, une autonomie dirigée, qui se donne l’apparence de l’absence de directives, un pouvoir à la fois produit et producteur de paradoxes. »p75 Extrait du livre le Capitalisme Paradoxant un système qui rend fou de Vincent de Gaulejac et Fabienne Hanique
Les services qui nous soutiennent nous font des petites pressions du type :
« vos activités sur notre secteur ne prennent pas suffisamment de place au regard de vos activités sur le secteur de l’autre service qui vous finance ».
« il faut que vous refassiez pour la 3ᵉ fois votre devis, car il ne rentre pas dans les cases du ministère qui finance »
« dans notre service nous nous battons pour continuer à exister et vous soutenir donc vous devez être irréprochables sur ce qu’on vous demande »
« non, cette action nous ne la financerons pas, car nous ne sommes pas en accord avec l’association partenaire avec qui vous travaillez »
« si vous ne signez pas le contrat d’engagement républicain on ne pourra plus vous financer »
« comme le CRIDEV est financé par notre service ce serait vraiment bien que vous participiez à tel ou tel groupe de travail que nous organisons (même si ce n’est pas écrit dans la convention) »
« sur cet appel à projet il n’y a pas de critères plus précis c’est très large, à vous de nous convaincre »
Soit il y a des CASES rigides, soit il n’y a pas de CASES et c’est la voie tracée au CLIENTÉLISME !
Pris un par un, chaque financeur a plutôt envie de nous soutenir, mais nous sommes fatigué·e·s #épuisé·e·s de subir l’accumulation de ces pressions paradoxales.
Voici un bout de l’analyse de Vincent de Gaulejac et Fabienne Hanique pour expliquer ce mécanisme : « Le projet politique est clairement annoncé par le directeur : « faire bouger la France » en adaptant le système de production (les grandes entreprises) et l’administration ( les ministères et les institutions publiques) aux exigences du marché ; des grandes institutions financières et de la globalisation économique, en définitive aux exigences du capitalisme néolibéral. » p82
Ce paradoxe se ressent également dans les pratiques, passer presque plus de temps à « rendre compte » selon LEURS critères : « Iels ne pensaient pas en se dirigeant vers ce métier qu’iels partageraient de moins en moins leur temps dans des relations directes avec les populations, au profit de dossiers à constituer qui justement valorisent les effets du travail relationnel des animateurs·ices auquel iels ont moins de temps à consacrer. » Extrait de l’article [Re]politiser l’animation ? de Jean-Luc Richelle

Manue, Ambre et Damien pour le CRIDEV
Pour aller plus loin
« Le travail social à l’épreuve de l’idéologie managériale »
Interview de Vincent de Gaulejac
« L’impact des régimes de gouvernance sur les métiers du champ social »
Roger Bertaux et Hirlet Philippe